24 décembre 2005

APRILE

Parce qu'il n'a plus assez de choses à raconter sur son nombril, Giovanni Moretti décide de faire une comédie musicale sur un pâtissier trotskiste... ou un doc sur la politique italienne... mais son fils va bientôt naître... et Berlusconi risque de remporter les législatives... Bref, un joli bordel. Moretti semble avoir tiré des leçons de la demi-réussite de Journal intime. Exit les scènes chiantes, il livre une véritable comédie qui fait réfléchir et se poiler. En italien, Woody se dit Nanni. 77 petites minutes de bonheur où chacun en prend pour son grade, même les films (si Heat laisse Nanni sceptique, Strange days est décrit comme un tissu de conneries). Moretti trouve le tempo idéal et parvient à mêler sans heurts la politique berlusconienne et les joies de la paternité ("Quatre kilos deux-cent-vingt!"). C'est beau, c'est drôle, c'est touchant (ou tout à la fois, comme quand Nanni découvre sur un mètre-ruban qu'il a dépassé le milieu de sa vie). Cette fois, on en redemande.
8/10

JOURNAL INTIME

Première partie des confessions filmées de notre barbu préféré (devant le père Noël, oui). L'inconvénient des journaux intimes, c'est que souvent ils n'ont déintérêt que pour celui qui y écrit. Là, c'est un peu le cas. Moretti parle de trucs qui le passionnent, mais qui pour nous sont légèrement ... ordinaires, ou inintéressants (oh! Nanni boit un verre d'eau! ah! Nanni prend le bateau! eh! Nanni rencontre Jennifer Beals dans la rue! uh! Nanni va au cinéma!). Heureusement, un mauvais esprit chronique et une imagination pas pourrie donnent naissance à des scènes d'anthologie (celle où Nanni va border un critique de cinéma pour lui relire les atrocités qu'il a écrites vaut son pesant de cacahuètes). Et la forme est assez bizarre : une sorte de documentaire réécrit et remis en scène. Ça peut dérouter. Divisé en trois chapitres, Journal intime est bien meilleur dans le dernier, farce à la Molière, lorsque Nanni fait le récit de ses aventures avec les médecins.
5/10

21 décembre 2005

LE DÉMÉNAGEMENT

La comédie de trantenaires-qui-font-le-point a toujours été et sera toujours à la mode. À trente ans, on est toujours préoccupé par les mêmes choses, les mêmes choix (j'en sais quelque chose, j'en ai vingt-et-un). La réussite de ce genre d'entreprise dépend principalement du casting et de la finesse de l'écriture. Ici, c'est plutôt pas mal. La distribution est un mix sympa de comiques-sachant-faire-autre-chose (Dany Boon, Dieudonné-quand-il-était-drôle) et d'acteurs-dits-intellos-sachant-faire-autre-chose (Emmanuelle Devos, Sami Bouajila). Venu de la pub, Olivier Doran sait ce qu'il dit à propos du monde infernal de la télévision, même si son propos peut sembler cliché. Comédie rapide (une heure et demie, sans happy end à rallonge), Le déménagement se rapproche du Lawrence Kasdan de la bonne époque, celui qui savait raconter les histoires de potes comme personne.
6/10

VIPÈRE AU POING

Avant de mourir, Philippe de Broca a laissé un testament pour le moins gênant : une batterie de téléfilms pas reluisants et quelques films de cinéma très mous du genou sont venus gâcher sa jolie filmo belmondienne. Dernier fardeau avant le tombeau, cette adaptation de Vipère au poing fait bailler du début à la fin. La faute au roman de Bazin, assez insipide malgré un personnage fort. La faute à de Broca aussi, engoncé dans un classicisme épais qui n'attire ni l'oeil ni l'esprit. Seule Catherine Frot, bien servie par le personnage de Folcoche, parvient à donner quelques étincelles à un film qui sentait déjà le sapin bien avant que Villeret et de Broca ne passent l'arme à gauche.
3/10

LA PLUS BELLE VICTOIRE

Bienvenue dans Wimbledon, la comédie romantique la plus légère et prévisible de l'année. Tout ceci est absolument cousu de film blanc. Le héros, un tennisman vieillissant qui participe à son dernier Wimbledon, aurait évidemment pu être interprété par Hugh Grant (sauf que les mollets de celui-ci auraient sérieusement eu besoin de se muscler pour être crédibles). La jeune arriviste tennistique, un poil pimbêche et trois poils super canon, est un personnage archi-rebattu avec des airs de Martina Hingis. Et, oui, ça finit comme vous pensez. Alors quoi? Pourquoi La plus belle victoire est-il un film si enthousiasmant? Parce qu'en d'autres temps, le gamin que je suis aimait à taper la balle en regardant les filles passer. Parce que le tandem Bettany/Dunst est absolument craquant, et que leurs envies de baise sont communicatives. Parce qu'une success story, quand elle est bien racontée, est toujours agréable à suivre. Sommet de cinéma inoffensif, La plus belle victoire est un petit plaisir futile qui donne envie de reprendre une licence.
8/10

11 décembre 2005

CLERKS - LES EMPLOYÉS MODÈLES

Bienvenue qu Quick Stop Service. Une épicerie, un vidéoclub, où Dante et Randal vous accueilleront de moyennement à très mal. Sorte d'enchainement de saynettes rigolardes uniformément drôles, Clerks a marqué son époque et fait la célébrité de Kevin Smith. Le film a ouvert la voie aux self made films : pas besoin de beaucoup de moyens pour faire de bons films. Le noir et blanc est imparfait, le nombre de décors est ultra réduit, seule l'écriture et la débrouille comptent. Et contrairement à son personnage récurrent de Silent Bob, Kevin Smith a des tas de choses à dire sur le hockey, le sous-entendu syndicaliste dans Star Wars, les pornos hermaphrodites, la clope, la mort et la douzaine d'oeufs parfaite. Un cocktail vraiment hilarant, pouvant se regarder en boucle sans vraiment se lasser, comme quand on retrouve ses potes un peu lourdauds mais tellement attachants.
8/10

WHEN NIGHT IS FALLING

L'homosexualité est toujours un sujet délicat à traiter sans faire dans le moralisme ou le cliché. C'est donc en étant le plus simple possible, en ne considérant pas l'homosexualité comme une différence mais comme une alternative, qu'un film sur ce thème peut fonctionner. La délicatesse de When night is falling, sa douceur, son refus de toute polémique sont de grosses qualités. Enseignante dans un établissement religieux, s'apprêtant à épouser Martin, Camille rencontre Petra qui la drague ouvertement, et avec succès. L'histoire contée ici est davantage une histoire d'adultère qu'un quelconque constat sur l'homosexualité. Et le message est d'autant plus fort. Lors d'un entretien pour une promotion, lorsqu'un révérend lui demande ce qu'elle pense de l'homosexualité, Camille perd ses moyens, et on la comprend. Que faire? Rester dans l'hypocrisie et décrire cela comme un pêché? Ou taper du poing sur la table et ruiner sa carrière? Par petites touches, sans brusquer ni ses personnages ni les spectateurs, Patricia Rozema réussit un joli film qui pose des questions intéressantes mais n'évite pas un certain classicisme.
6/10

MYSTIC PIZZA

Trois jeunes filles bossent dans la meilleure pizzeria de Mystic : l'une hésite à épouser le pêcheur qui l'attire physiquement mais qu'elle n'est pas sûre d'aimer, la deuxième craque pour le riche play-boy de service qui lui raconte des craques, et la sage troisième tombe amoureuse du père de la petite fille qu'elle garde après l'école... un résumé qui confirme que, contrairement à ce que j'ai pu croire pendant toute mon enfance, Mystic pizza n'est pas une histoire de nourriture mystérieuse, mais bien une bluette se déroulant dans un bled paumé, également connu pour sa rivière (au fond de laquelle pourrit toujours le corps de Tim Robbins). Voilà un film un peu bas de plafond qui ne va guère plus loin que le roman-photo mais se révèle pourtant assez attachant, notamment grâce à ses interprètes (Lili Taylor et Julia Roberts en tête). Idéal pour une soirée entre filles, le sachet de chips légères dans une main, la boîte de Kleenex dans l'autre. Également valable pour les mecs qui sont en fait de vraies midinettes (oui, moi).
5/10

CITY OF GHOSTS

Jamais sorti dans nos salles, jamais édité en DVD Zone 2, le premier film de Matt Dillon est pourtant une sacrée curiosité. City of ghosts conte l'exil cambodgien de Jimmy (Dillon himself) au Cambodge après une gigantesque escroquerie à l'assurance. Là, il retrouve son mentor et ses associés louches, un gentil barman français et une fille franchement attirante. Mais une accumulation de cadavres et de situations flippantes font sortir Jimmy de ses gonds... Coscénarisé avec Barry Gifford (excellent compagnon de route de David Lynch), City of ghosts vaut surtout pour son ambiance torve et malsaine. Les bars cambodgiens ne sont pas spécialement rassurants, la misère règne, on crève de chaud, on attend sa valise de billets verts... Casting de première classe (d'un Caan magnétique à un Depardieu truculent), scénar tordu, ambiance réussie : tout concourt à faire de City of ghosts un étrange voyage initiatique dont les quelques longueurs ne dissimulent à aucun moment le vrai gros talent de Dillon.
8/10

SALTON SEA

À la suite de l'assassinat de sa femme, Tom Van Halen, trompettiste, devient Danny Parker et infiltre un groupe de junkies afin de se venger du tueur. Pour cela, il organise un gros trafic de drogue. Jeu dangereux... et film dément. Pour son premier long, D.J. Caruso signe un coup de maître. Au début, on croit se trouver face à une sorte de resucée de Trainspotting, mais avec moins d'efets quand même. Et puis la magie fait que le personnage de Tom/Danny nous scotche, qu'on souffre avec lui, et qu'on veut voir comment va s'accomplir sa vengeance. Car là où le scénario est futé, c'est qu'on ne sait jamais vraiment combien de longueurs d'avance il a sur nous. Et Salton sea de ne pas être qu'un simple drame (ce qui aurait déjà été très bien), mais un film sans cesse surprenant, qui distance sans cesse le spectateur sans pour autant être un film à gros tiroirs. Filmé de façon magistrale, incarné d'une façon vraiment hallucinante par Val Kilmer (qui derrière sa mauvaise réputation est vraiment un grand acteur), Salton Sea laisse sans voix.
8/10

IZNOGOUD

Au début, Patrick Braoudé était un réalisateur sympa. Sans rien attendre de ses films qu'un peu de divertissement, on passait des moments gentiment agréables. Seulement, passé à une dimension supérieure, celle du blockbuster à la française, Braoudé ne tient pas la distance. Il est difficile de rire devant Iznogoud. Les tentatives de gags y sont rares et n'aboutissent jamais. Michael Youn, Jacques Villeret et compagnie ne sont rien de plus que des personnages colorés mais n'apportent rien ni au récit ni à l'humour de l'ensemble. Le plus "intéressant" ici, c'est de jouer au jeu de "qui-sera-la-prochaine-guest-star?". Il faut bien se trouver des occupations devant ce sommet d'ennui navrant. Car si les bandes dessinées de Gosciny et Tabary ne brilaient pas par leur drôlerie, elles avaient au moins l'avantage d'être composées de courtes histoires de 4 ou 5 pages. Ici, forcément, ça dure une heure et demie. Pensez à prendre des mots croisés.
1/10

BLADE RUNNER

Alors c'est ça le grand film de science-fiction des eighties? Malgré le bon matériau de base du roman de Philip K. Dick (qui n'est pas le dernier des écrivaillons), Blade runner est un film ennuyeux où seules subsistent quelques excellentes idées (les Répliquants, des personnages fascinants). Pourquoi a-t-il fallu que Ridley Scott, alors auréolé du succès d'Alien, en fasse une banale course-poursuite dans les bas fonds de la ville, un peu comme il allait le faire ensuite dans le pas très bon Black rain? De toute façon, il n'y a qu'à voir les costumes et certains décors pour se rendre compte du ratage : il y a là-dedans un mélange de noirceaur et de kitsch complètement à côté de la plaque. À l'image du personnage de Rutger Hauer, le grand méchant de l'histoire, qui ferait plutôt rire qu'autre chose avec ses cheveux fluos, une sorte de pré-hommage à Steevy.
4/10

GO!

Difficile de croire que le Doug Liman de La mémoire dans la peau et Mr. & Mrs. Smith soit celui qui a réalisé, quelques années auparavant, ce Go de piètre facture. Le scénar mélange tout ce qui se veut de plus hype : de la drogue, du sexe déjanté, une structure rashomonesque... Tout ceci pour une histoire absolument inintéressante dont on se demande bien pourquoi on doit absolument se la taper sous trois points de vue différents. Heureusement que les bouilles de Sarah Polley et Katie Holmes (pas encore vampirisée par Tom C.) sont là pour nous occuper.
3/10

VOYAGE AU BOUT DE L'ENFER

Le film français laisse stupidement entendre qu'il s'agit d'un film de guerre qui finira en boucherie. Pas du tout. Le titre original (The deer hunter) est bien plus cohérent. Bien plus qu'un film de guerre, Voyage au bout de l'enfer est un drame en trois actes où l'acte guerrier est seulement un révélateur des forces et faiblesses des personnages. Que voit-on de la guerre au Vietnam? Pas grand chose. Une dizaine de soldats américains faits prionniers par les Vietnamiens, c'est tout. Trois quarts d'heure au Vietnam pour un film de trois heures : voilà qui montre bien face à quel genre de film on se trouve. Avant/pendant/après : Cimino montre comment la guerre peut changer un homme à tout jamais. La bande de joyeux chasseurs de cerfs, scindée au moment de la guerre, ne sera plus jamais soudée. Déchirant, abrupt, le film de Cimino prend son temps pour disséquer les tréfonds de l'âme humaine. Ici, les scènes de banquet sont aussi importantes que les scènes de guerre. Nos héros sont des humains, pas des Terminators. Bouleversant de part en part, Voyage au bout de l'enfer laisse une marque durable dans le coeur et sur la peau du spectateur.
9/10

10 décembre 2005

MON ANGE

Réputé pour son excellent scénario de La fille sur le pont (transcendé par le noir et blanc de Patrice Leconte), Serge Frydman est malheureusement l'auteur de choses un peu moins glorieuses, à peu près les pires trucs que Veber et de Broca ont pu réaliser. Il y a un peu de tout ça dans Mon ange : quelques scènes vraiment admirables, où explose le talent de dialoguiste de Frydman, et aussi beaucoup de déchets. Comme beaucoup de films de scénaristes, Mon ange souffre d'être bien trop écrit. On n'est pas face à un film, on est devant un scénario filmé. Ça fait une sacrée différence. Heureusement, le duo Paradis/Rottiers fonctionne à merveille. Ça ne suffit pas pour dépoussiérer Mon ange et lui ôter sa pellicule d'ennui.
4/10

LE DERNIER SAMOURAÏ

Quand on se retrouve face à Tom Cruise et Edward Zwick, on peut espérer le pire cpomme le meilleur. Comme son ex-femme Nicole K., Cruise a une fâcheuse tendance à se la péter "regardez-comme-je-joue-de-manière-professionnelle", mais peut aussi être très brillant pour peu qu'un vrai directeur d'acteurs soit derrière la caméra. Quant Edward Zwick s'il est certes un assez bon réalisateur, l'idéologie de ses films (À l'épreuve du feu, Couvre-feu) est parfois douteuse. Détachez vos ceintures, décontractez-vous, Le dernier samouraï est vraiment impec. Le film est une jolie fresque qui tient parfaitement le coup tout le long de ses 2h20. De jolis combats, une morale humaniste pas trop dégoulinante et des acteurs sensas (même si Cruise est un peu trop bien coiffé, il tient bien le choc face à l'excellent Ken Watanabe) : tout ce qu'il faut pour faire du Dernier samouraï un divertissement de haut de gamme.
7/10

GODSEND - EXPÉRIENCE INTERDITE

Après avoir perdu son fils unique, un couple le fait cloner illégalement. Au début tout va bien. Puis l'enfant atteint l'âge de sa première mort... Sur un postulat pas plus con qu'un autre (d'autant que le sujet est d'actualité), le scénario de Godsend est un tissu d'inepties à faire pisser de rire n'importe quel scénariste en herbe. Uniformément mal joué (notamment par un De Niro au sommet de son cabotinage), le film de Nick Hamm deviendrait presque divertissant de par sa nullité totale. Le dénouement du film multiplie les révélations moisies. Au début, ça fait rire. Ensuite, on a quand même sérieusement l'impression de perdre son temps devant une clonerie de plus.
1/10

06 décembre 2005

LES CHIENS DE PAILLE

Âmes sensibles s'abstenir : Les chiens de paille fait passer n'importe quel autre film pour un épisode des Bisounours. On a jamais vu le malaise aussi bien représenté sur grand écran. Pourquoi celà? Parce que le film de Peckinpah montre des évènements qui pourraient arriver à chacun de nous (à condition d'aller s'installer à Poivrotland dans une vieille maison au milieu de nulle part). Chaque élément se met peu à peu en place pour mener à la fin paroxystique du film : une mise à feu et à sang déclenchée par des villageois imbibés d'alcool et de vengeance. Alors à son apogée, Dustin Hoffman campe parfaitement un type un peu mal dans sa peau qui tente de résister à la bêtise d'abord en la fuyant, puis en la combattant, mais trop tard pour que cela finisse bien. On en sort avec l'enive de prendre une bonne douche, sali par tant de sentiments craspec (outre les scènes de fusillade, une scène de viol particulièrement angoissante, dont même Gaspar Noé n'est pas parvenu à retrouver le niveau de dégueulasserie).
8/10

05 décembre 2005

SNOWBOARDER

Le jeune cinéma de genre français a du souci à se faire. Julien Magnat, Doug Headline, Olias Barco : autant de noms qui s'ajoutent d'année en année à la liste des pauvres petits frenchies qui se prennent les pieds dans le tapis. À se demander s'il ne vaut pas mieux appartenir à l'industrie Besson (oui... enfin non). Snowboarder est l'improbable histoire d'un ex-champion qui veut faire courir son poulain sous son nom "pour connaître la gloire une dernière fois". Sauf que le spectateur a compris deuis belle lurette qu'il allait sans doute cambrioler une banque ou un truc du genre et que ça allait lui faire un alibi béton. Film se voulant très fashion Snowboarder comprend une soirée mousse, une séance de baise avec Clara Morgane, des répliques cultes (le célèbre "Si tu restes, je pars avec toi"), de la coke, un strip-tease de Clara, et un peu de snowboard quand même. Et tout ça pour le prix d'un navet! Dommage que Barco ne se soit pas focalisé sur le snowboard : il semble avoir un joli coup de caméra pour filmer les scènes en montagne. Mais non : monsieur a voulu faire son auteur. Au moins, ça fait une bonne comédie pour se poiler avec ses potes. Ça vaut bien 2/10.
2/10

04 décembre 2005

PLEIN SOLEIL

À la sortie du Talentueux M. Ripley d'Anthony Minghella, les gens ont dit "oh, ma bonne dame, tout ça ne vaut pas Plein soleil. Et puis au moins, y avait Alain Delon". Les gens sont des cons, figurez-vous. Parce que Plein soleil est bien loin d'être le chef d'oeuvre impérissable dont parlent nos amis les vieux. Ennuyeux et vieillot, le film ne bénéficie pas de l'abattage d'un Jude Law ou d'un Matt Damon. Car, répétons-le, sauf chez Joseph Losey ou chez quelques rares autres, Alain Delon n'est pas un très bon acteur. Et cette histoire déjà difficile à avaler sur le papier devient carrément ingérable et invraisemblable. Un type aussi con qui éxécute aussi bien un plan géniial avant de se trouver pris au piège à cause de sa connerie, c'est très con. Plein soleil est donc un film très con, qui se distingue tout de même par sa très jolie photo (surtout pour les scènes de mer).
4/10

CASINO

Revoilà Scorsese dans son genre de prédilection : la tragédie d'un gangster ambitieux. Et c'est parti pour trois heures de menaces, de coups foireux, de sévices et de doutes. La première heure est l'une des plus maîtrisées qu'on ait vu ces dix dernières années : presque uniquement en voix-off, Robert DeNiro et Joe Pesci décrivent le casino, son fonctionnement précis, les enjeux qui s'y font et défont, les protagonistes, leurs combines... En un déferlement d'images superbes, Scorsese éblouit. Si la suite est plus "classique" (tout en restant au niveau du grand cinéma de Scorsese), elle reste très prenante. Dans Les affranchis ou Mean streets, les femmes restaient au second plan et se contentaient d'élever les gosses. Ici, le personnage de Sharon Stone est un déclencheur de bien des évènements dramatiques, et certainement la clé de l'histoire. Joli renouveau, qui apporte à Casino sa singularité. Bourré de gens talentueux, réalisé de main de maître par un Marty en grande forme, Casino est l'un des rares films des années 90 à faire l'unanimité autour de sa grande qualité. C'est comme ça qu'on devient un réalisateur de légende.
8/10

03 décembre 2005

BOOGIE NIGHTS

Boogie nights est un film sérieusement membré, à l'image de son héros, Dirk Diggler, acteur porno surdimensionné. Pour son deuxième long, P.T. Anderson utilise idéalement un style très scorsesien (on n'ira pas jusqu'à parler de plagiat) pour conter l'ascension irrésistible d'un porno-man de talent. La première partie, brillamment filmée, fait preuve d'un humour et d'une finesse rares pour un auteur de cet âge (25 ans à l'époque). Puis vient évidemment le temps de la décadence. Là, Anderson se fait moins léger et montre une certaine propension à faire du mélodrame. Ici, c'est encore très acceptable. Dans son film suivant, Magnolia, ça le sera nettement moins. Le film doit beaucoup à son très très gros casting. Imaginez un peu : outre mark Wahlberg dans son premier grand rôle, on trouve John C. Reilly, Burt Reynolds, Julianne Moore, Heather Graham, Don Cheadle, William H. Macy, Philip Seymour Hoffman, Alfred Molina... Soit une brochette foutrement talentueuse, qui donne à Boogie nights ses lettres de noblesse. Par la suite, Anderson démontrera qu'il n'est pas l'homme d'un seul film et qu'il a son style propre. Ce qui rend Boogie nights encore plus admirable.
7/10

SEXE, MENSONGES ET VIDÉO

Drôle de film. Encensé à Cannes, avec Palme et prix d'interprétation à la clé, Sexe mensonges et vidéo n'est rien de moins que le premier film de Steven Soderbergh. Si palmer un tel film semble être légèrement excessif, notons que cette année-là, le président était un certain Wim Wenders, lui-même auteur de films tournant autour de la perception des images et de l'emploi de la vidéo. La rumeur veut que Wenders ait souhaité décerner tous les prix au film, signe de son manque total d'objectivité et de discernement. Alors qu'en fait, Sexe mensonges et vidéo est un sympathique carré amoureux et sexuel, auquel se mêlent les vidéo-confessions. Assez malin dans son écriture jusque dans son montage, le film bénéficie de la prestation épatante de James Spader, qui n'a pas volé son prix. Quant au propos ("rien n'est jamais acquis"), il est suffisamment bien traité pour donner l'impression d'être neuf. Déjà à l'époque, Soderbergh était un sacré petit malin. Ça n'a pas changé depuis.
6/10

VOL AU-DESSUS D'UN NID DE COUCOU

Pour échapper à la prison, Randall McMurphy se fait passer pour fou et débarque dans un asile. Bien décidé à ne pas se soumettre à la loi de l'inflexible infirmière Ratched, McMurphy mène ses congénères à la révolte. Et Milos Forman livre une chronique à la fois humaniste et cynique sur l'enfermement et la condition humaine. Sorte de festival de gueules toutes plus hallucinées les unes que les autres, le film est à la fois très cruel et très drôle, à l'image d'un Jack Nicholson déchaîné. Vraiment solide, la réalisation de Forman met en valeur les excellentes prestations des comédiens. Chacun dans son genre réussit une prouesse : réussir à camper un personnage de fou sans faire son Forrest Gump relève du tour de force. D'où un film toujours sur le fil du rasoir, mais toujours du bon côté.
8/10

PALOMBELLA ROSSA

Michele est député communiste et joueur de water-polo. À la suite d'un accident qui lui fait perdre la mémoire, Michele repense à sa vie politique et sportive tout en participant à la finale du championnat. Palombella rossa est un film aussi bizarre que son résumé. Difficile de définir l'objectif de Nanni Moretti : s'il délivre quelques réflexions bien senties sur la vie politique et le communisme, si son approche du water-polo est assez rigolote, on ne comprend pas bien où il veut en venir. Ex joueur pro lui-même, il semble avoir concilié ses deux sujets de prédilection, deux sujets absolument pas reliés. C'est touchant. C'est tout.
5/10

PRESQUE CÉLÈBRE

Voici la pièce maîtresse de la filmographie de Cameron Crowe (les mauvaises langues diront qu'elle est inexistante, je leur urine au postérieur). L'épopée rock d'un ado un peu coincé qui se retrouve à couvrir la tournée du groupe Stillwater pour le magazine Rolling Stone. Presque célèbre n'est pas un film sur le rock à proprement parler. On parle beaucoup et on joue peu. C'est à peine si l'on entend la musique de Stillwater. c'est là qu'est le génie du scnéario : Crowe montre que le plus important dans le rock n'est pas la musique elle-même, mais ce qu'on en dit (ça peut d'ailleurs s'appliquer au cinéma lui-même : combien d'heures de discussions passionnées et ésotériques pour 2 heures de film?). Le doute plane : Stillwater est-il un groupe génial ou une bande de branques? À la rigueur, on s'en tamponne. En s'accrochant à ce groupe, Crowe peut ainsi décrire l'ensemble du monde du rock des seventies. La version longue (2h35, disponible sur le double DVD) donne à l'histoire sa pleine mesure et comble la frustration de la version courte, qui passait vraiment trop vite. Les affres de la création (musicale comme journalistique), la rivalité, l'ambition et le rapport entre musique, sexe et drogue sotn les sujets majeurs du film. Sous un aspect mi-documentaire mi-chronqieu romancée, Crowe se réfère à sa propre histoire (il a lui aussi été critique rock dans ses jeunes années). Ça donne un film simple et beau, dense et intense, qui souffle autant qu'il divertit.
9/10