25 juin 2006

CELLULAR

Après le succès de Phone game, qu'il a écrit il y a de longues années avant de le ressortir des cartons pour Joel Schumacher, Larry Cohen a eu une idée très originale : imaginez un polar, un semi huis-clos, dont tous les enjeux sont concentrés autour d'une communication téléphonique. Le genre d'idée qui fonctionne une fois, mais pas deux.
Là où Phone game était un thriller assez haletant et vraiment futé, Cellular s'apparente davantage à un divertissement pop-corn pour mous du bulbe. Tiré par les cheveux, parfaitement invraisemblable de bout en bout, le scénario surligne chaque élément au feutre fluorescent. Apparemment conscient de la faiblesse du script, David R. Ellis ajoute çà et là quelques éléments de comédie. Ça fait vraiment de la peine de voir William H. Macy se ridiculiser dans le rôle d'un flic vieillot adepte des spas et des masques de beauté. Kim Basinger fait ce qu'elle peut (pas facile de jouer la plupart de ses scènes seule dans un grenier) et Chris Evans fait très bien l'endive. Quant au spectateur, il peut au choix s'amuser au détriment du film en répertoriant les cascades foireuses et les évènements abracadabrantesques, ou sombrer dans l'ennui et préférer terminer sa nuit.
Que Larry Cohen tire les enseignements de ce ratage total et se creuse un peu plus les méninges pour trouver une autre idée de scénario. Pourquoi pas un projet autour d'un mini-aspirateur?
1/10

SLING BLADE

Parce qu'à 12 ans, il a tué sa mère et l'amant de celle-ci, Karl Childess a passé la majeure partie de sa vie en hôpital psychiatrique. Aujourd'hui, il sort. Histoire de se trouver une place. Et de s'acheter une rédemption?
Lauréat de l'Oscar du scénario, Billy Bob Thornton est également le réalisateur et le convaincant acteur principal de ce Sling blade.
Les films de débiles mentaux sont souvent les plus conventionnels du monde. Sirupeux, moralisateurs, ils offrent des messages battant des records de consensualisme. Thornton tente d'éviter ces pièges en construisant un film sobre et exigeant, qui fait de Karl un personnage certes attachant mais dont la simple présence continue à provoquer un certain malaise. Pas facile de se trouver dans la même pièce qu'un meurtrier, même si celui-ci a payé pour ses fautes.
Sling blade est d'abord le récit d'un parcours initiatique, avec moultes scènes imposées. Karl trouve un job, Karl découvre les joies de la nourriture, Karl se fait un ami... On n'échappe pas toujours aux clichés du genre, mais c'est plutôt solide. Et puis, à mesure que le film avance, on comprend que Sling blade ne sera jamais Rain man, tout simplement parce que ce n'est pas le but de son auteur. Aux prises avec un sale type qui brime la gentille mère célibataire qui l'héberge, Karl va devoir choisir entre la liberté (en laissant couler) et le bonheur de ceux qu'il aime (en cédant à ses envies de meurtre). C'est la partie la plus savoureuse du film. Gentiment pervers, délicieusement ambiguë, elle souffre cependant d'un côté trop prévisible : au vu du déroulement des scènes, on devine vite comment tout cela va finir. Néanmoins, Thornton réussit plutôt bien son pari : faire d'un attardé mental un vrai personnage de film et pas une simple icône que le spectateur va plaindre pendant deux heures. Heureux soient les simples d'esprit : il leur est enfin rendu grâce.
6/10

10 juin 2006

L'ANTIDOTE

L'antidote est l'un des tous derniers films avec Jacques Villeret. C'est à peu près la seule raison de s'infliger cette comédie même pas drôle, où Clavier fait du Clavier et le scénario du sur place.
L'idée de départ ressemble fort à celle d'un Veber : un PDG se met brusquement à faire des crises d'angoisse qui le font buter sur les mots de plus de deux syllabes et transpirer abondamment. Jusqu'au jour où il croise la route de François Pignon, pardon, André Morin, boursicoteur communiste, dont la simple présence suffit à apaiser ses crises. Les deux nouveaux compères vont faire un brin de route ensemble...
Seulement voilà : quand Veber est en forme, ça donne des comédies alertes, drôles et merveilleusement dirigées. Seulement, ici, L'antidote est à peu près au niveau de ce que Veber a pu faire de pire. Les situations banales s'enchainent laborieusement. Une Béatrice Schönberg par-ci, un Michel Drucker par-là, histoire de rameuter la ménagère de moins de 50 ans. La première demi-heure suffit amplement à se faire une idée : le reste n'est que répétition, cabotinage et ennui total. Déjà auteur d'un navet de l'espace avec Michel Courtemanche (La ballade de Titus), Vincent de Brus semble décidément avoir un grand talent : celui de transformer tout ce qu'il touche en aberration filmique.
2/10

06 juin 2006

THE EDUKATORS

"Die fetten Jahre sind vorbei" ("les années fastes sont derrière vous"). C'est le titre original du film, et le message que laissent Jan et Peter, alias les Edukators, après avoir visité et mis sens dessus dessous les maisons des grands bourgeois de leur ville. Une manière de leur faire comprendre qu'ils sont trop riches et qu'ils doivent renoncer à leurs propriétés. Jan et Peter vivent chichement, préférant l'utopie d'un monde où l'argent n'existerait pas plutôt que cette réalité trop cruelle. Mais la rencontre de la jolie Jule et des évènements qui tournent mal risquent d'avoir raison de leurs rêves...
Naïf, candide et maladroit, The edukators est à l'image de ses héros. Hans Wengartner semble parrtager les rêves de ses personnages principaux, qu'il érige en héros au début du film. Des révolutionnaires en culotte courte, qui font avec les moyens du bord pour se faire entendre. C'est touchant de naïveté. Ensuite, quand l'embryon de film socialo-politique implose pour laisser place à un triangle amoureux et à un drame social, on est frustré de ne pas voir les thèses utopiques du film menées à leur terme. C'est comme si Weingartner, brutalement conscient du côté totalement vain de la quête de ses personnages, avait changé de direction en cours de film pour éviter de tomber dans le ridicule. Ça donne un film un peu bâtard, pas déplaisant parce que bien joué, mais dont le message a une portée bien limitée.
4/10

03 juin 2006

PAPARAZZI

Parce qu'il s'est fait photographier par un paparazzo pendant un match de foot alors qu'il aurait dû se trouver au boulot, un pauvre veilleur de nuit se fait jeter. Voulant d'abord retrouver l'auteur de la photo pour lui casser la gueule, il va vite apprendre le métier de shooter professionnel.
Paparazzi semble être né peu après la mort tragique de Lady Di, poursuivie sous le pont de l'Alma par une armée de paparazzi en furie. Jean-François Halin et Alain Berberian en ont tiré une sympathique comédie à la française, bourrée de guest-stars dans des apparitions plus savoureuses les unes que les autres. De retour après leur succès de La crise, le duo Timsit-Lindon fonctionne à merveille dans des rôles taillés sur mesure. Ça donne un film dynamique et gentiment cynique sur un métier vraiment pas reluisant. Malheureusement, la dernière demi-heure patauge sacrément : pour montrer à ceux qui n'auraient pas compris que paparazzi = salaud frustré, les scénaristes optent pour un virage un peu plus dramatique pour pouvoir donner quelques leçons au passage. On se serait bien passé de cet enchainement de bons sentiments et de morale prémâchée qui ruinent un peu la bonne impression générale donné par un film pas hilarant mais franchement divertissant.
6/10

01 juin 2006

MON PETIT DOIGT M'A DIT...

Réalisateur vieille France inspirant à beaucoup une certaine sympathie et à d'autres un profond ennui, Pascal Thomas change légèrement de registre en adaptant un roman d'Agatha Christie ("By the pricking of my thumbs"). Les romans de Christie étant souvent des modèles de construction mais sentant quelque peu la naphtaline, Thomas aurait pu choisir de dépoussiérer l'ensemble. Mais non : il conserve ce côté complètement surannée, voire irrémédiablement vieillot, qui fera sans nul doute le bonheur des plus nostalgiques d'entre nous.
Sur une intrigue policière échevelée et pas crédible pour deux sous, Pascal Thomas tente de brosser un tableau loufoque et décalé, mêlant humour british et gags à la française. Mais tout celà est extrêmement raté et procure une impression étrange : si on a souvent vu des acteurs cabotins (et ici, il y en a, André Dussollier en tête), Mon petit doigt m'a dit... semble créer une notion nouvelle, celle de réalisateur cabotin. On a l'impression de voir Pascal Thomas à chaque coin de plan, en train de faire des clins d'oeil et des grimaces comme pour dire "z'avez vu comme il est singulier, mon film, hein?". Sensation horripilante, qui se mêle à de sérieuses crises de baillements. Heureusement, il y a Catherine Frot, pimpante et fantasque, qui sauvait déjà (en partie) La dilettante, du même Thomas, du naufrage. C'est bien le seul point positif d'une mascarade sinistre qui sent sacrément le nanar.
2/10