14 décembre 2006

A SCANNER DARKLY

Le réalisateur de Rock academy qui adapte Philip K. Dick en coloriant en studio les acteurs qu'il a fait tourner? Si si, c'est possible. Après avoir expérimenté cette technique originale dans l'ennuyeux Waking life, Richard Linklater remet le couvert et signe un film étonnant et fascinant.
Dès le début, l'alchimie opère : cette image un peu bizarre mais vraiment bien foutue donne l'impression de plonger dans un autre monde, un univers où le flottement est roi. Pas de doute, on est bien chez Philip K. Dick : ambivalence des situations, substances louches, personnalités multiples. Mais bizarrement, ce n'est pas par son aspect thriller SF que A scanner darkly séduit le plus. Ce qu'il y a de captivant, c'est ce bavardage incessant entre les personnages, où l'absurde et le non-sens pointent leur nez au détour de chaque réplique. Comme si Linklater avait emprunté une porte secrète l'emmenant chez Beckett, Kafka et Hunter S. Thompson. À ce petit jeu, c'est le génial Robert Downey Jr. qui l'emporte, au détriment d'un Keanu Reeves pas mauvais mais plus en retenue (forcément, c'est la caution "sérieuse" du film).
A scanner darkly apparaît alors comme un trip sous acide, ou mieux, sous "substance mort" (la drogue très efficace et très dangereuse du film). Et là encore, l'esthétique marche à plein tubes : voir apparaître un éléphant rose dans un coin de l'écran ne serait même pas surprenant. Et la SF, alors? À vrai dire, on s'en fout un peu, trop stone pour comprendre réellement quels sont les rouages de l'intrigue. Nul doute qu'elle est intéressante : paranoia ambiante, jeux de miroir tordus (le héros est chargé de se surveiller lui-même), matériel high-tech (des capes qui vous font changer d'apparence à chaque instant, pour empêcher qu'on vous identifie)... Nul doute qu'au bout de quelques visions, A scanner darkly s'imposera non seulement comme le trip ultime, mais également comme un passionnant film de genre. Ou pas.
8/10

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