31 octobre 2005

STRANGER THAN PARADISE

En mai 1984, Stranger than paradise est entré dans la légende cinématographique. Que ceux qui pensent que j'en fais trop me lisent attentivement : si le film est entré dans la légende, c'est parce qu'il est le premier deuxième film à recevoir la Caméra d'Or (qui est le prix cannois du meilleur premier long, rappelons-le pour nos amis incultes). Des sélectionneurs étourdis semblent avoir oublié Permanent vacation. Tant mieux pour l'ami Jim, qui bénéficia grâce à ce prix d'une jolie réputation. Stranger than paradise est le premier vrai film jarmuschien. Sur un noir et blanc d'une beauté inouie, Jarmusch suit le court périple de deux potes, Willie et Eddie, et d'Eva, la cousine de Willie, fraîchement arrivée de Hongrie. Car Willie ne s'appelle pas vraiment Willie, mais Bela, à son grand désarroi. Losers attachants, les trois compagnons de route cherchent à s'apprivoiser : meilleur ami d Willie/Bela, Eddie est amoureux d'Eva, qui voudrait bien que son cousin Willie/Bela se mette à l'apprécier.Deux éléments importants de l'univers jarmuschien éclatent totalement ici : le jeu sur le langage (ici le hongrois ; plus tard l'italien, le français, la langue de l'indien Nobody) et le désintérêt total pour une quelconque forme de suspense. Pour celà, Jarmusch use de son fameux sens de l'ellipse et du court-circuit : lorsqu'Eva se met soudain à avoir des problèmes d'argent, elle croise un dealer qui la prend pour une autre et lui remet une grosse enveloppe. Ça peut sembler artificiel, mais ça ne l'est pas. C'est la méthode Jarmusch : se débarrasser laconiquement de tout ce qui pourrait ressembler de près ou de loin à un passage obligé. Jarmusch développe son humour à froid avec un sens du tempo qui ne peut que filer la patate, à l'image du dernier plan, un avion qui décolle. Jarmusch lancé, rien n'allait plus pouvoir l'arrêter.
9/10

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