14 janvier 2006

INNOCENCE

Un cercueil arrive d'on ne sait où. À l'intérieur, une petite fille nommée Iris. Bien vivante. Elle débarque dans un monde étrange. Une sorte d'école réservée aux filles, coupée du monde, au coeur d'une forêt bordée de grands murs. Elles y font leur apprentissage, montent chaque année en grade (c'est-à-dire que les rubans de leurs cheveux changent de couleur), et se préparent. Mais à quoi? Que foutent-elles là? D'où viennent-elles? Vous espérez des réponses? Vous en aurez. Quelques-unes. Réseau pédophile, école de danse, école de la vie, métaphore géante, expérience sociologique : chacun peut y aller de sa supposition, le film ne se décide jamais vraiment. Innocence fascine d'abord par sa rigueur, qui renvoie à celle de l'école du film. Des règles étranges régentent la vie. On n'y reçoit aucune visite, on y a peu de distractions, on ne pose pas de questions. Étrange que, passée la découverte déconcertante de ce lieu pour le moins singulier, la plupart des jeunes filles se plient au règlement sans se demander si tout ceci est bien normal. Innocence est une histoire de cycles : ceux qui caractérisent le fonctionnement de l'institution, et ceux dont l'apparition va marquer la transformation des jeunes filles en femmes. Thème confirmé par l'apparition d'un dernier symbole, peut-être trop lourd de sens, mais qui tend à faire d'Innocence le simple récit d'un apprentissage et d'une mutation. Transcendé par la réalisation froide mais pas malsaine de Lucile Hadzihalilovic (madame Gaspar Noé), Innocence est un bijou irréel, le film le plus original de 2005, mêlant mystère, trouble et contemplation.
9/10

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